Voici un peu plus d’un an que le brevet européen à effet unitaire est entré en vigueur, le 1er juin 2023, après plusieurs dizaines d’années d’âpres discussions. Cette arrivée représente un changement majeur pour l’ensemble des déposants de brevets, et pas seulement en Europe. Elle implique une nouvelle procédure, de nouvelles actions et dates, d’autant plus qu’y est associé un nouveau tribunal, la Juridiction Unifiée des Brevets. Nécessairement, tous ces nouveaux évènements doivent apparaître dans les bases de données. Comment ? C’est ce que nous allons voir.
Le brevet européen à effet unitaire est né sur des fondations : le brevet européen classique.
Valoriser une invention par un dépôt de demande de brevet dans son pays, la France par exemple, c’est bien, mais les produits créés par nos entreprises ayant rarement un marché uniquement en France, il peut être sage d’étendre le dépôt de demande de brevet national par des dépôts à l’étranger, générant une famille de brevets qui sera constituée de l’ensemble des titres valorisant une même invention dans plusieurs pays.
Si votre marché se trouve dans plusieurs pays - France, Allemagne, Espagne… - il est nécessaire d’effectuer un dépôt auprès des offices de chacun de ces pays, dans des langues différentes, initiant des procédures qui risquent de ne pas avancer à la même vitesse, générant un ensemble difficile à gérer, et coûteux.
Pour remédier à cet inconvénient, a été mis en place en 1973 le brevet européen classique, qui n’est pas un brevet de l’Union européenne.
C’est simplement un dispositif astucieux où un ensemble de pays (39 maintenant) décident de confier à un organisme unique (l’office européen des brevets, abrégé OEB) la réception d’un dépôt unique de demande de brevet européen, puis l’examen, et, le cas échéant, la délivrance d’un brevet européen. Toute la procédure se passe dans une des 3 langues officielles de l’OEB, qui sont l’anglais, l’allemand et le français.
Mais alors, quelle différence avec un brevet qui serait de l’Union européenne ? En premier lieu c’est qu’il n’y a pas 27 pays dans le système, mais 39, y compris la Turquie, la Norvège et la Suisse par exemple. En second lieu, c’est qu’après la délivrance, le tronc commun s’arrête : le déposant peut alors décider d’« activer » (le terme exact est « valider ») son tout nouveau brevet européen dans tout ou partie des 39 pays. S’il valide dans 10 pays, le brevet européen génère 10 brevets nationaux, un dans chacun de ces 10 pays, et les taxes annuelles de maintien en vigueur seront à payer auprès des 10 offices nationaux correspondants. Car, rappelons-le, pour maintenir un brevet en vie, il faut chaque année payer une taxe. S’il y a une contrefaçon, par exemple en Turquie, il faudra porter le cas devant le tribunal national compétent, en l’occurrence le tribunal turc.
Il manquait donc un chaînon à l’édifice : faire en sorte que l’on n’ait pas de brevets nationaux, sortant du brevet européen, mais un seul brevet en vigueur sur un territoire unique, celui de l’UE. Et qu’en cas de contrefaçon, on puisse aller devant un tribunal unique qui jugerait de la contrefaçon sur ce territoire unique.
C’est l’OEB qui a récupéré la gestion du brevet unitaire, sous son angle examen, délivrance, validation, et aussi, point important, maintien en vigueur : plus besoin de payer une taxe auprès de 5, 10, 15 offices nationaux pour maintenir 5, 10, 15 brevets nationaux issus d’un brevet européen : une seule taxe est à payer auprès de l’OEB.
Tout se passe comme auparavant avec un brevet européen classique ; simplement, une fois le brevet européen délivré, aux 39 cases à cocher correspondant aux 39 pays adhérents à la Convention sur le Brevet Européen, s’y adjoint une nouvelle : la case UE.
Le déposant peut donc valider son brevet européen sur l’UE, et, dès lors, il n’est plus nécessaire de cocher une des cases correspondant à un des pays de l’UE. Par contre, si on souhaite une validation en Suisse par exemple, il faudra toujours cocher la case « Suisse » pour récupérer un brevet national suisse, issu de son brevet européen.
UE donc, toute l’UE ? Cela aurait été trop simple. Disons simplement que si les négociations furent si longues, ce fut en particulier dû à la question des langues. Les Espagnols n’ont pas réussi à convaincre leurs homologues d’ajouter l’espagnol aux 3 langues officielles. L’Espagne n’a donc pas souhaité être dans le système. La Croatie quant à elle est arrivée trop tard dans l’UE pour y être.
Donc ce n’est pas l’UE, c’est l’UE 25. Il faudra toujours cocher la case « Espagne » ou la case « Croatie » pour disposer d’un brevet européen validé dans ces pays.
UE 25 donc, vraiment ? Pas encore, car tous les pays n’ont pas encore ratifié le traité sur la juridiction unifiée des brevets. Depuis le 1er septembre 2024, c’est l’UE 18, mais ce chiffre va évoluer pour atteindre UE 25 ; ces 18 pays sont l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Bulgarie, le Danemark, l’Estonie, la Finlande, la France, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, le Portugal, la Roumanie, la Slovénie et la Suède.
Dans les bases de données, il convient d’être en mesure d’identifier le brevet européen à effet unitaire, et les évènements associés.
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