Nous avons le plaisir d’accueillir dans nos colonnes Marydee Ojala, professionnelle de l’information américaine très connue. Elle est rédactrice en chef de la revue ONLINE SEARCHER.
Nous avons adapté pour BASES l’article de Marydee, précédemment publié dans sa version originale en anglais dans la section ONLINE SEARCHER du numéro 5, volume 44, paru en juin 2024 de la revue COMPUTERS IN LIBRARIES sous le titre « The perils and power of NOT in prompting Chatbots » dans la rubrique « Voices of the searchers »
La plupart des professionnels de l’information connaissent bien les commandes booléennes de base : AND, OR et NOT. Elles fonctionnent parfaitement pour la recherche dans les bases de données traditionnelles. Lorsque nous enseignons les techniques de recherche, nous nous appuyons sur des exemples et des diagrammes de Venn pour démontrer la puissance de la recherche booléenne. J’ai toujours pensé que nous devrions souligner les dangers de la commande NOT, en particulier dans les ressources en texte intégral proposant des documents volumineux.
Pour les professionnels de l’information, documentalistes, analystes ou chargés de veille stratégique, la production de présentations de grande qualité est devenue un must en termes de (re) présentation personnelle et de communication. Qu’il s’agisse de communiquer les résultats de leur veille, de leurs recherches ou de leurs activités, ils doivent choisir l’outil le plus adapté pour capter l’attention de leur audience et transmettre leur message avec clarté et efficacité.
L’IA a fait irruption sur ce segment en apportant beaucoup de créativité en termes de graphisme, mais aussi de contenu. Il faut donc désormais examiner les outils de production graphique à l’aune de ces deux critères.
Avec la multiplication des outils et applications promettant monts et merveilles en matière de présentation, on peut être tenté de se précipiter sur le plus « marketé ».
Le battage médiatique autour de l’IA générative a quelque peu éclipsé les avancées tout aussi décisives de l’IA prédictive dans les domaines de la recherche et de la veille d’informations. Pourtant, la première n’aurait pas rencontré un accueil aussi favorable dans les entreprises sans l’expérience de la seconde qui opère déjà, depuis des années, une transformation en profondeur de nos pratiques professionnelles.
Depuis qu’il est devenu possible pour tous d’interroger des intelligences artificielles dans un langage naturel, on parle beaucoup de l’impact de l’IA générative pour les métiers de l’information (voir notre article « Search: quand les moteurs “recherchent pour vous” », BASES n° 425, mai 2024).
Mais cette dernière n’est pas arrivée en terrain vierge. Il est donc temps de remettre en lumière l’IA prédictive pour replacer l’apport des modèles de langage dans une perspective plus juste au sein des métiers info-documentaires.
Il aura finalement fallu très peu de temps pour que nous nous sentions maintenant dépendants des IA génératives telles que ChatGPT, Claude, Gemini, Mistral et bien d'autres dans notre organisation et processus d’entreprise.
S'y ajoutent tous les outils, plugins et applications que nous testons et intégrons progressivement dans nos activités professionnelles. Peu importe que la pérennité de ces applications soit souvent incertaine, nous en changeons avec la même facilité que nous les avons adoptées.
Car c'est là la "magie" de l'IA : la transformation d'une tâche, d'un processus ou d'un livrable ne tolère pas de retour en arrière.
Pourtant, la menace existe, qui se réactive dans nos esprits au moindre incident de ChatGPT (ils sont nombreux). On a pu encore en faire l’expérience lors de très récente panne de plus d’une journée de Copilot (ex BingChat).
Philippe Masseron du gf2i (Groupement français de l’industrie de l’information) nous éclaire sur les enjeux cruciaux du droit d’auteur à l’ère de l’IA générative. Entre risques de prédation massive des contenus et opportunités d’accès et d’innovation portées par l’IA, les acteurs de la création et de l’information doivent se mobiliser pour défendre leurs intérêts et repenser leurs modèles de valorisation.
Le rôle d’instances comme le gf2i sera clé pour peser dans les débats législatifs en cours et créer les nouveaux équilibres dans l’économie de la donnée.
Expert en droit de la propriété littéraire et artistique et en gestion de droits
Après des études juridiques (DEA en Finances publiques et Fiscalité – Paris 2) et en Information Communication (Institut Français de Presse – Paris 2), Philippe MASSERON a successivement occupé les postes de directeur juridique et directeur général au CFC (Centre Français d'exploitation du droit de Copie).
Il est administrateur du gf2i (Groupement Français de Industries de l'Information) délégué à la prospective. Il participe régulièrement aux missions du CSPLA.
Anne-Marie Libmann (AML) : Comment définissez-vous le problème de fond sur la question du droit d’auteur par rapport aux systèmes d’intelligence artificielle générative (SIAG) ?
Philippe Masseron (PM) : Nous assistons à une réaccélération et une amplification massive du phénomène de scraping, fouille et crawling des données. Cela n’est pas nouveau, nous avons déjà été confrontés à des situations similaires par le passé qui ont suscité de vives inquiétudes, comme lors du lancement de Google Books ou des grands programmes de numérisation des bibliothèques. Mais l’échelle et la vitesse ont changé. Aujourd’hui, il existe d’immenses bases de contenus protégés accessibles, notamment dans le domaine scientifique, par exemple SciHub qui rassemble des millions de documents en infraction avec le droit d’auteur.
La plateforme Scopus propose depuis longtemps des outils de recherche classiques : opérateurs booléens, et de proximité, navigation dans les citants/cités. Les fonctionnalités apportées par Scopus AI permettent d’expérimenter de nouvelles stratégies.
Tous les serveurs/agrégateurs présents sur le marché sont en train d’intégrer plus ou moins rapidement des fonctionnalités d’intelligence artificielle. Ils le font souvent en proposant à des bêta-testeurs, souvent des clients importants, de les aider à finaliser la mise au point de ces nouvelles fonctionnalités. D’autres, et ce n’est pas incompatible, mettent progressivement à disposition des séries d’outils innovants.
Entre les annonces de Google et d’OpenAI, l’utilisation de l’IA dans la recherche redessine irrémédiablement les pratiques sur Internet. Aux agrégateurs traditionnels comme les moteurs de recherche et les médias sociaux, s’ajoutent donc les moteurs avec IA. Pour les veilleurs, le challenge se déplace de la synthèse à la vérification des résultats de recherche.
Il y a quelques jours, OpenAI volait la vedette à Google qui présentait pourtant sa Keynote, événement phare des groupes de la tech. La rumeur, qu’Open AI ne s’est pas empressé de démentir, annonçait le lancement de son propre moteur de recherche. Finalement, ce dernier a (en attendant?) présenté un nouveau modèle gratuit qui intègre le web et les GPTs, des fonctionnalités jusqu’alors payantes (environ 20 €/mois). Si l’on ajoute la liste d’accords de licences avec les médias qui s’allonge chaque semaine, on comprend que l’ambition de ce dernier est réelle et se veut à la hauteur des attentes.
Les utilisateurs utilisent en effet les chats d’IA comme des moteurs de recherche et y font leurs recherches malgré le risque d’hallucination. La recherche d’informations fait ainsi partie des usages inattendus des modèles de langage, créés à l’origine pour deviner des suites de phrases. D’après une étude de The Verge, 53 % des utilisateurs et 61 % des Millenials utilisent les chats IA plutôt que les moteurs de recherche traditionnels pour faire leurs recherches.
Deux études récentes révèlent que la durabilité des informations sur le web est loin d’être garantie.
La première traite des liens DOI et montre qu’environ 27 % des documents ne sont pas conservés dans des archives pérennes. La seconde étude indique que 25 % des pages web créées il y a dix ans ont disparu, et de nombreux liens sur ces pages sont brisés. Ces résultats mettent en lumière les défis de la préservation de l’information numérique à long terme.
C’est un grand changement si on se réfère à l’ère du papier qui a débuté en 1 450 et a duré environ cinq siècles sans partage. En effet, pendant cette période, le support papier pour l’information paraissait relativement éternel préservé au moins pendant très longtemps dans les bibliothèques sauf incident majeur tel qu’un incendie ou les conséquences d’un conflit armé.
Dans une ère caractérisée par la volatilité des données numériques et le développement de l’IA dans notre sphère informationnelle, le rôle des professionnels continue de se transformer. Ceux-ci doivent affirmer toujours plus leur rôle de médiateur entre la technologie et les utilisateurs, et développer une compréhension critique des outils proposés.
La suppression du cache par Google a mis en lumière la fragilité de notre accès aux informations historiques, et marque d’une certaine façon la fin de l’ère de l’accès instantané et illimité. Elle met également en évidence l’importance qu’il y a à élaborer des stratégies d’archivage et de recherche rigoureuses pour sauvegarder les contenus numériques.
L’intégration croissante de l’intelligence artificielle dans les pratiques médiatiques modifie profondément les méthodes de travail des journalistes, mais aussi des professionnels de la veille. L’automatisation de tâches telles que la transcription de podcasts et la synthèse d’articles vise à libérer du temps pour des analyses journalistiques plus poussées. Toutefois, cela nécessite une vigilance accrue de notre part pour garantir la véracité et de qualité des informations, dont les méthodes de production deviennent parfois opaques.
Le fact-checking, autrefois domaine réservé à l’expertise humaine, bénéficie maintenant d’un coup de pouce de l’IA. Cependant, la fiabilité de ces outils de contrôle dopés à l’IA doit être constamment évaluée et testée. Nous nous retrouvons dans une situation inédite : utiliser l’IA pour contrôler l’exactitude d’autres productions potentiellement issues de l’IA elle-même.
Enfin, les agrégateurs de flux RSS, comme Inoreader, proposent de nouvelles manières de gérer notre mémoire informationnelle. Ces outils, véritables extensions du cerveau humain, permettent un accès rapide à l’information tout en exigeant une utilisation judicieuse pour éviter la surcharge d’informations et assurer la conservation de l’essentiel.
À lire dans ce numéro :
Médias + IA : la nouvelle équation à laquelle il faut s’adapter
Second cerveau digital : jusqu’où Inoreader nous aide-t-il ?
Google a récemment annoncé qu’il avait retiré le cache des pages Web dans les résultats du moteur. C’était pourtant une option bien utile quand une page ou un site n’était pas disponible.
Le cache est cependant toujours disponible si on utilise l’opérateur dédié dans la requête : cache:bases-publications.com
. Mais cette fonctionnalité a aussi vocation à disparaître dans les prochains mois.
Danny Sullivan, un des porte-parole de Google a expliqué que le cache « était destiné à aider les gens à accéder aux pages quand, à l’époque, on ne pouvait souvent pas compter sur le chargement d’une page. De nos jours, les choses se sont grandement améliorées. Il a donc été décidé de le retirer. »
Heureusement, il existe plusieurs options quand on souhaite visualiser l’historique d’un site ou quand il n’est tout simplement pas disponible. La plus connue et que l’on ne présente plus est la Wayback Machine proposée par Internet Archive (https://archive.org/), même si elle est loin d’être parfaite.
Une autre solution intéressante peut consister à utiliser le site CachedView (https://cachedview.nl/).